Un week-end sur l’île de Sado

April 5, 2020, par Thomas

Le Japon est un archipel, mais il faut reconnaître qu’en tant que citadin Tokyoite, cette réalité est bien souvent quelque peu abstraite, la mer n’est bien sur jamais loin, y compris dans l’assiette, mais mon quotidien est plus rythmé d’îlots de béton que de cotes sauvages.

C’est pourquoi quand en Juin 2017 mon ami Jordy m’a proposé d’aller visiter l’île de Sado, je n’ai pas hésité une seconde. C’est une île tout à fait méconnue, des étrangers bien sur, mais aussi des Japonais eux-meme, bien qu’étant la 5eme plus grande île du Japon!

Je suis donc parti retrouver Jordy dans son appartement à Tokyo pour travailler ensemble la journée, avant de partir en Meow-Mobile ( le nom de sa voiture * ) en direction de la ville de Niigata aux alentours de minuit.

Après 4 bonnes heures de route, interrompues par un sommeil pour Jordy, une sieste pour moi, sur une aire d’autoroute, nous voilà arrivés à notre première étape : le port de Niigata.

Le port de Niigata aux aurores.
Départ aux aurores du port de Niigata.

Après une traversée sans encombre de 2 heures, là encore mise à profit pour récupérer de notre nuit sur la route, nous apercevons vers 8 heures du matin les côtes de l’île de Sado!

Les cotes de Sado.
Terre à l’horizon!

Nous posons nos pieds nos roues à terre, prêts à découvrir cette île! Un sentiment sans aucun doute bien différent de celui des différents exilés qui furent envoyés ici durant des centaines d’années.

Mais nous reviendrons sur la riche mais néanmoins sombre histoire de l’île un peu plus tard, pour l’instant, direction notre première destination: le village de Shukunegi.

Situé sur la côte Sud de Sado, le village de Shukunegi est un ancien village de pêcheurs et charpentiers de marine. C’est à ces derniers que l’on doit ces jolies maisons en bois, fabriquées avec les mêmes techniques que celles utilisées pour fabriquer les bateaux de l’époque.

Il n’y a bien sur aucun touriste, et la ballade est fort sympathique. Comme souvent à la campagne Japonaise, le village est victime de l’exode urbain des jeunes, et sans l’action d’une association locale qui s’occupe d’entretenir les maisons et de promouvoir le lieu, il tomberait sans doute très vite en ruine, ce qui serait bien dommage!

Enthousiasmés par cette première destination, nous ne perdons pas de temps et nous partons vers notre prochaine étape, un sanctuaire abandonné en pleine montagne!

Sur la route, le ciel se dégage franchement, et nous profitons du temps estival pour rouler fenêtres ouvertes vers la côte Nord de l’ile.

Il nous apparaît déjà que l’île de Sado est vraiment sous-estimée, avec ses jolis villages, ses jolies plages … pourquoi donc personne ne vient ici?

Pas un nuage. Une ambiance bien différente de Tokyo.

Après quelques hésitations GPS-istiques, nous finissons tant bien que mal par localiser ce fameux sanctuaire abandonné que Jordy avait repéré sur internet des mois ( ou des années ? ) auparavant …

Mon premier Haikyo, comprenez “ruine” en Japonais.

Certains, comme Jordy, en sont devenus dingues, et parcourent le Japon à leur recherche, écoles, hôpitaux, hotels … ou même des temples et sanctuaires comme ici.

Au-delà de l’aspect ( parfois ) photogénique de ces lieux, ce sont surtout des vestiges de l’histoire et sont comme une fenêtre ouverte sur le Japon du siècle passé.

L’entrée du sanctuaire est une longue allée de Torii, qui ne sont sans doute pas tout jeunes vu leur état… je dois dire que cela a un vrai charme, et par une journée magnifique comme aujourd’hui il n’y a aucun coté lugubre, juste le calme.

Le bâtiment principal quand à lui est tout aussi délabré que les Torii, nous y entrons tout de même sans nous y attarder, car le temps passe et il nous reste encore pas mal de route pour nous rendre à la pointe Nord-Est de l’île.

Nous filons donc en Meow-mobile en longeant la cote Nord de l’île, une cote superbe, sauvage et ponctuée de petits villages de pêcheurs encore bien conservés.

La cote Nord de l’île.

La route est magnifique, mais la fatigue commence à vraiment se faire sentir. Le soleil nous invite plutôt à nous arrêter faire la sieste sur une des nombreuses plages que nous croisons…

Nous arrivons finalement à Futatsugame, un îlot, ou plutôt 2, qui comme leurs noms l’indiquent ( en Japonais ) ressemblent à 2 tortues.

Bon, comme souvent avec les “rochers qui ressemblent à …” je n’ai pas vraiment remarqué quoi que ce soit, si ce n’est que le lieu est vraiment très joli, et qu’encore une fois nous sommes seuls!

J’en profite pour me baigner, l’eau est encore bien fraîche en ce début de mois de Juin!

2 Tortues, évidemment.

Le soleil commence à doucement décliner dans le ciel, il est temps pour nous de rebrousser chemin pour rejoindre notre hébergement du soir, une minshuku ( sorte de maison d’hôte ) en bord de mer!

Nous reprenons donc la meme route qu’à l’aller, mais cette fois éclairée par le soleil couchant, un spectacle vraiment splendide!

Jour 2


Nous nous réveillons de bonne heure le lendemain matin, nous avons encore un programme chargé pour découvrir les charmes de l’île de Sado!

Après avoir englouti ( sauf le natto ! ) notre petit-déjeuner à l’hotel nous montons encore une fois à bord de la Meow-mobile plus requinqués que jamais!

Notre première étape de la journée nous amène au Sud de l’île, non-loin du village de Shukunegi que nous avions visité la veille.

Nous voulons voir une des attractions principale de l’île, les tarai-bune, des embarcations traditionnelles de l’île, en forme de demi-tonneaux avec un renfoncement au milieu qui permet de voir les fonds marins.

Ces tarai-bune étaient autrefois utilisés par les pêcheurs locaux pour pouvoir repérer depuis leur embarcation les différentes richesses cachées sous la surface ( algues, ormeaux et autres crustacés ). Leur forme particulière leur conférait une stabilité et maniabilité accrues dans les eaux souvent peu profondes et agitées des côtes de l’île.

Ces tarai-bune sont désormais surtout une attraction touristique et il est possible de faire une ballade à bord. Très peu pour nous qui préférons observer de loin, et continuer notre périple vers notre deuxième destination, l’ancienne mine d’or de Sado.

En effet, le destin de l’île a radicalement changé quand de l’or y fut découvert à l’epoque Edo, en l’an 1601.

Cette mine, alors contrôlée par le puissant shogun Ieyasu Tokugawa, fut l’une de ses sources de revenus principale, lui permettant de développer l’ensemble du Japon.

Bien sur, la découverte de ce gisement et la création de la mine impliquèrent un besoin accru en main d’oeuvre, entraînant inévitablement une augmentation du nombres de personnes condamnées à l’exil sur l’île, mais aussi un certain boum économique.

La mine fut active jusqu’en 1989, le dernier exil forcé eu lieu quant à lui en 1700.

Il est désormais possible de visiter une partie des anciennes galeries sous terraines reconverties en musée.

Après cette pause historique, nous repartons vers un autre endroit emblématique de l’ile, la pagode du temple Myōsen-ji.

C’est un magnifique temple, et une magnifique pagode qui s’offrent à nous, et là encore sans aucun autre visiteur à l’horizon.

Je ne peux m’empêcher d’imaginer le nombre de touristes qui arpenteraient ces lieux si nous étions à Tokyo ou Kyoto…

Il est désormais temps pour nous d’attaquer notre dernière destination de la journée, Iwakubi Shoryu Tanada, des rizières en terrace avec vue sur mer!

Après de nouvelles difficultés GPS-istiques, entraînant quelques détours par des routes sans doute plus fréquentées par les sangliers que par les hommes, nous arrivons sains et saufs à destination ( excepté la meow mobile qui a perdu une pièce en plastique protégeant son chassis ).

Ces rizières datent sans doute de l’époque Edo ( ~1700 ), il en reste aujourd’hui 460, passées de génération en génération.

Le résultat est une vue plongeante sur la mer, on remarquera d’ailleurs que l’on aperçoit le “continent” et ce qui est sans doute la ville de Niigata à l’horizon. On ne pouvait rêver mieux pour finir cette dernière journée sur l’île.

Enfin … la journée n’est pas tout à fait finie car nous nous dirigeons maintenant vers notre hébergement, la Guest Villa On The Bi-ichi.

Il s’agit d’un batiment relativement moderne, comprenant un restaurant de cuisine fusion Franco-Japonaise au rez-de-chaussée, et d’une petit chambre d’hôte à l’étage. Le tout face la mer.

Ce fut une excellente surprise de découvrir un endroit comme celui-la sur l’île, malheureusement, le restaurant était complet ce soir là et nous avons donc dû aller manger ailleurs, mais ce n’est que partie remise!

Hotel & Restaurant

Guest Villa on the Bi-ichi

Restaurant au rez-de-chaussée, maison d’hôte à l’étage. le tout avec vue sur mer et dans une ambiance très moderne, je recommande chaudement si vous cherchez un hébergement sur l’île.

Nous finissons notre journée en sirotant une bière sur la terrasse en admirant le coucher de soleil.

Sado est définitivement sous-estimée, elle possède une mer sublime, une nature sauvage et des villages pleins de charmes, tout en restant facilement accessible depuis Tokyo.

J’ai bien l’intention d’y retourner, mais cette fois en hiver, car le climat y semble extrêmement rude avec d’importantes chutes de neige, je pense que l’ambiance sera alors bien différente, mais tout aussi intéressante.